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Nutrition Triathlon

Comment s’alimenter lors d’un triathlon ?

Le triathlon est un sport compétitif, car c’est lors des compétitions que l’on peut vivre les sensations procurées par les transitions. Bien sûr, il est possible de reproduire cela à l’entraînement, mais ce n’est pas tout à fait pareil qu’avec un dossard épinglé. Bien réussir sa course le jour J repose sur une préparation spécifique en amont, tant sur le plan technique que physique ou même mental. Et quand bien même, la préparation a été studieuse, il est un aspect qui peut réduire à néant tous vos objectifs : la nutrition !

Article paru dans Trimax-magazine n°218 – Juillet 2022
Redigé par Jean-Baptiste Wiroth

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Objectifs de l’alimentation de compétition

Le principal objectif est de retarder l’apparition de la fatigue lors du triathlon. En effet , en plus d’avoir réalisé une préparation physique adaptée, la nutrition joue un rôle fondamental dans la prévention du phénomène de fatigue précoce.

Les autres objectifs de l’alimentation de compétition sont de :

  • Prévenir les troubles digestifs
  • Faciliter la récupération post-effort

En triathlon courte distance (efforts de moins de 2 heures), l’alimentation joue un rôle important, mais pas fondamental. En CD, il faut surtout éviter certaines erreurs qui pourraient compromettre le résultat final (prendre un dernier repas trop copieux et/ou trop tardif par exemple).

À l’inverse, le triathlon longue distance représente le summum de la difficulté en termes de contrainte énergétique et métabolique. L’importance de la dépense énergétique induite par les longues heures d’effort nécessite donc l’adoption d’une stratégie nutritionnelle adaptée pour finir “proprement” sa course.

Les principales erreurs à éviter

  1. Prendre son dernier repas trop tardivement… et se retrouver en pleine digestion lors de la natation. Le dernier repas doit avant tout être léger et digeste pour ne pas occasionner d’effort digestif conséquent.
  2. Tester une nouvelle boisson de l’effort le jour J… et s’apercevoir qu’elle est écoeurante. Il convient donc de toujours tester à l’entraînement les nouveaux compléments (boissons, barres, gels…) ou aliments, afin de s’assurer qu’on les tolère bien.
  3. Ne boire que de l’eau plate… et constater que cela n’est pas suffisant en termes d’apport énergétique et minéral. Bien entendu, la base de l’alimentation de compétition est de préserver l’état d’hydratation. En la matière, l’eau légèrement salée est l’idéal pour un massage rapide du tube digestif vers le sang.
  4. Manger trop de fibres les jours précédant la course… et avoir des problèmes digestifs le jour J. Bien qu’indispensables au bon fonctionnement du tube digestif (élimination), les fibres alimentaires peuvent surcharger ou irriter l’intestin et le côlon le jour de la course. Il convient donc de les réduire lors des 3 à 5 jours qui précèdent la compétition.
  5. Trop manger sur le vélo… et se retrouver en pleine digestion lors de la course. C’est peu fréquent mais cela peut arriver.

Cas particulier du triathlon longue distance

Les épreuves longues distances se caractérisent par une durée généralement comprise entre 5 et 15 heures et une intensité moyenne (70% de la puissance maximale aérobie). À cette allure, les muscles utilisent un mélange énergétique composé pour environ moitié de glucose et moitié d’acides gras. Les stocks corporels de glycogène étant limités (300 à 500 g dans les muscles et le foie, selon le gabarit), la bonne gestion de l’effort consiste donc à approvisionner régulièrement les muscles en glucides pour optimiser l’utilisation des glucides exogènes (absorbés pendant l’effort) et à diminuer l’oxydation des glucides endogènes (stockés dans les muscles et le foie sous forme de glycogène).

Avant l’effort

La règle numéro 1 consiste à garder ses (bonnes) habitudes alimentaires tout en procédant tout de même à quelques adaptations pour permettre un stockage optimal de glycogène et débuter l’épreuve bien hydraté.

Les spécialistes s’accordent actuellement à dire qu’il n’est pas nécessaire de faire une surconsommation de glucides pour stocker efficacement le glycogène. Durant les 3 jours précédant l’épreuve, on augmentera de 25% la part de féculents (pâtes, riz, semoule, pomme de terre…) consommée à chaque repas, tout en maintenant un certain équilibre nutritionnel (65% glucides / 20% lipides / 15% protides).

Ceux qui sont sensibles au niveau digestif veilleront tout de même à limiter leur consommation de fruits et légumes pour ne pas surcharger le tube digestif. Il est tout de même important de noter que les fibres végétales ont le pouvoir de retenir les liquides absorbés en se gonflant d’eau, ce qui peut s’avérer être particulièrement intéressant pour une épreuve réalisée par forte chaleur. À tester avant l’objectif !

Le dernier repas sera avant tout digeste pour ne pas occasionner d’effort digestif trop important et éviter les désagréments en début de course (vomissements). La durée séparant la fin du repas et le début de l’échauffement sera généralement comprise entre 1h30 et 3h.

Une cure d’acides aminés ramifiés (leucine, isoleucine, valine) peut s’avérer intéressante car ceux–ci vont contribuer à la fourniture énergétique en fin de course, et limiter l’élévation du taux de sérotonine cérébral (probablement responsable de la fatigue cognitive, voire neuro-musculaire, qui apparaît lors d’effort de longue durée).

Pendant l’effort

Pendant un triathlon longue distance, l’objectif nutritionnel principal consiste à retarder l’apparition de la fatigue (musculaire, nerveuse et psychologique). Pour cela, les impératifs nutritionnels sont de :

  1. Limiter la déshydratation
  2. Prévenir l’hypoglycémie
  3. Apporter de l’énergie aux muscles
  4. Prévenir les troubles digestifs
  5. Éviter l’écœurement occasionné par une surconsommation de produits trop sucrés

Pour répondre efficacement à ces impératifs, l’utilisation d’un aliment de l’effort composé presque exclusivement de glucides est fortement recommandée. Les spécialistes de la nutrition de l’effort s’accordent actuellement à dire que l’aliment idéal doit comporter un mélange de glucides (glucose, fructose et maltodextrines). Ce mélange permet d’obtenir un taux d’oxydation musculaire plus élevé (de l’ordre de 1.5-1.7 g/min) que si l’on consomme l’un des 3 types de glucides de manière isolée (de l’ordre de 1 g/min). Une telle différence est liée au fait que ce sont des transporteurs spécifiques qui permettent le passage du glucose, du fructose et des maltodextrines au travers de la membrane digestive, indépendamment des uns des autres.

Pour le moment, le mélange idéal (s’il existe) n’a pas encore été déterminé. On peut cependant penser qu’un rapport 20% glucose / 20% fructose / 60% maltodextrines est un bon compromis pour le triathlon longue distance (du half à l’Ironman). Un tel mélange sera absorbé rapidement sans causer de “blocage” digestif, tout en assurant un apport en énergie et une hydratation optimale.

L’alimentation de l’effort, qu’elle soit liquide ou solide, doit apporter 50 à 80 g de glucides par heure de course. De tels niveaux d’apport énergétique nécessitent un entraînement spécifique du tube digestif (qui peut être entraîné comme les muscles ou tout autre organe).

Exemple de stratégie nutritionnelle pour longue distance type Ironman effectué en conditions chaudes :
  • Natation : 250 ml de boisson énergétique juste avant le départ ou bien 1 gel (40-50g) + 250 ml d’eau
  • Transition natation/vélo : 1 gel énergétique (40g) + 250ml eau
  • Vélo : L’objectif est de boire 500 à 750 ml de boisson par heure de course, soit environ 100 ml de boisson énergétique toutes les 10 minutes. Toutes les heures prendre un fruit (banane), une barre énergétique ou un gel avec de l’eau. Pour ceux qui sont écœurés rapidement par le goût sucré, l’utilisation d’une boisson salée ou neutre peut être particulièrement intéressante (maltodextrines goût neutre par exemple).
  • Transition vélo/course : 1 gel énergétique (25g) + 250 ml eau
  • Course à pied : en théorie, il faut garder la même fréquence d’hydratation en utilisant une boisson énergétique hypotonique (peu concentrée). Toutes les 30 minutes, prendre 1  fruit ou un gel énergétique avec de l’eau.

Quelques remarques 

Acides aminés ramifiés (BCAA) : l’adjonction de protéines ou d’acides aminés ne semble pas améliorer les performances selon la littérature scientifique. Néanmoins, pour des efforts de plus de 10h, il n’est pas interdit de consommer une petite portion de BCAA sur le vélo.

Caféine : de nombreuses études ont montré que l’ingestion de caféine avant puis pendant l’effort permet de repousser la fatigue. Divers mécanismes sont avancés pour expliquer un tel phénomène :

  1. Amélioration de l’absorption du glucose. En agissant sur la muqueuse intestinale, la caféine permettrait d’absorber plus de glucose exogène durant l’effort.
  2. Diminution de la fatigue neuro-musculaire, qui apparaît tôt ou tard lors d’un effort d’endurance. Le phénomène physiologique se déroulerait au niveau de la jonction entre les motoneurones et les fibres musculaires. L’action positive de la caféine permettrait  une augmentation du temps limite à une puissance ou vitesse de course donnée.
  3. Résistance à l’insuline. La caféine induirait une résistance à l’insuline, limitant ainsi les fluctuations de glycémie durant les phases d’effort peu intense (longues descentes à vélo par exemple).
  4. Améliorer la vigilance. On peut fortement supposer que la caféine permet une meilleure concentration et un prélèvement de l’information plus efficace
  5. Modifier la perception de l’effort. Après ingestion de caféine, il semblerait que l’effort soit perçu comme moins difficile.

Glossaire

Index glycémique : certains sportifs présentent une forme d’intolérance aux sucres rapides, qui les rend sujets à des variations de glycémie pendant l’effort. L’hyperinsulinisme est souvent la cause de ce problème. Dans le cas présent, il ne faut pas hésiter à recourir à des aliments beaucoup plus simples (eau, fruits, petits sandwichs au jambon…) pour éviter les baisses de régimes.

Sodium : pour faciliter la vidange gastrique, la boisson énergétique idéale doit absolument comporter du sodium en petite quantité (rajouter 1g de chlorure de sodium par bidon). L’usage de pastilles de sel n’est pas vraiment conseillé. Si vous êtes sujet aux crampes d’effort, vous pouvez néanmoins tester les pastilles de sel à l’entraînement.

Solide : La consommation d’aliments solides est souvent nécessaire pour éviter l’apparition de la sensation de faim et varier l’alimentation. Pour limiter la survenue de troubles digestif, il est néanmoins fortement recommandé de consommer le solide au début de la partie cycliste et de boire de l’eau (et non de la boisson énergétique) en parallèle. Afin de faciliter le processus digestif, on évitera de consommer des aliments solides trop gras ou trop protéinés.

Troubles digestifs : il est recommandé de procéder à un véritable entraînement nutritionnel : pour prévenir les troubles digestifs. On utilisera donc à l’entraînement les mêmes aliments que ceux utilisés le jour J et on évitera de consommer en course des aliments inhabituels. On évitera les boissons glacées. Nous reviendrons plus en détail sur ce thème dans un prochain article.

Références

Jeukendrup et al. Oxidation of carbohydrates feedings during prolonged exercise. Sports Med. 2000 Jun; 29 (6) : 407-424.

Tsintzas et al. Human muscle glycogen metabolism during exercise. Sports Med. 1998 Jan; 25 (1): 7-23.